Depuis le premier enregistrement consacré à l’orgue de Beethoven, agréablement joué par Wilhelm Krumbach en 1967 à Schleiden (Allemagne) pour le label Charlin, aucun autre disque de premier plan n’avait vu le jour pour nous montrer cette facette originale du compositeur. C’est chose faite avec la présente production qui regroupe un maximum de pièces, composées de près ou de plus loin pour l’instrument à tuyaux. Le titre même de l’album « Perspectives » en résume bien l’enjeu.
Dès son plus jeune âge, Ludwig tient l’orgue de l’église des Minimes et suit l’enseignement de divers professeurs dont l’organiste de la cour Christian Neefe. La fréquentation de cet instrument le rapproche d’un répertoire préexistant dont ses propres compositions furent influencées, même si leur attribution à l’orgue en est parfois controversée. Peu importe, l’essentiel est le rendu musical, tout à fait réussi dans le cas présent. Aux côtés de pièces charmeuses de style classique, on rencontre des œuvres plus strictes, polyphoniques, témoins d’époques précédentes.
On comprend alors les influences qui ont guidé le jeune musicien : L’image de Bach avec des fugues, Krebs ou Homilius avec des trios, et puis Haydn avec ses fameuses pièces pour orgue mécanique. Le programme est ainsi varié et attrayant au possible. Pour cette entreprise le label Aeolus nous offre à la fois un orgue contemporain du jeune Beethoven (1786), du facteur Ferdinand Stieffell, très proche dans sa composition de celui que joua le compositeur à Bonn et capté de manière très réaliste et équilibrée en support SACD avec plus de 89 minutes de musique ! (82′ sur lecteur CD simple). Certains jeux comme la Gambe sont d’une rare suavité et traduisent assez magiquement quelques ambiances viennoises et son fameux Prater.
Maria Magdalena Kaczor aborde ce répertoire avec un regard très juste et accrocheur pour le mélomane qui va retrouver quelques thèmes connus au cours du programme. Certaines Bagatelles pour le piano, judicieusement adaptées, retrouvent une nouvelle vie sous les timbres fruités de l’orgue de Karlsbad-Langensteinbach. Le jeu de l’organiste est souple et vibrant, ludique dans les galanteries, puissant dans les fugues…
On ne pouvait rêver une meilleure ambassadrice dans ce répertoire rendu bien plus captivant que ce qu’il n’y parait de prime abord. Beethoven organiste possède désormais son disque de référence, enrichi d’un très beau livret regroupant d’excellents textes et photos historiques des orgues, constituant ainsi une belle et précieuse œuvre d’art.