Matthias Weckmann (ou Weckman) est un compositeur-organiste particulièrement important de l’Allemagne du nord au XVIIᵉ siècle. Il fit ses études musicales à Dresde comme choriste à la cour de Saxe auprès de Heinrich Schütz. Cela lui permit de découvrir le style italien pratiqué par ce dernier quand il avait voyagé jusqu’à Venise et rencontré Monteverdi et les Gabrieli. Par la suite il vint à Hambourg pour étudier l’orgue auprès de Jakob Praetorius, grand maitre en la matière. Sur concours, il fût nommé organiste de l’église Saint-Jacques renfermant l’un des plus imposants instruments d’Allemagne. Comme la plupart des musiciens d’église de son temps, il a composé des pièces vocales, instrumentales ainsi que pour le clavier (orgue et clavecin). Pour autant, c’est l’œuvre d’orgue qui a fait la réputation de ce musicien savant par sa richesse d’écriture et sa variété, explorant diverses formes, souvent inspirées par l’Italie.
En deux disques, Léon Berben explore tout un ensemble très diversifié : Préludes, Toccatas, Canzone, Fugues, Fantaisies et surtout de splendides variations sur des hymnes et des chorals. Chaque CD utilise un orgue historique réputé : Le Stellwagen de l’église St Jacques de Lübeck sur lequel Helmut Walcha a gravé ses premiers disques de son intégrale Bach à partir de 1948 et le « Scherer » de Tangermünde, deux incontournables joyaux miraculeusement préservés par les siècles. On est ébloui par l’exubérance et le développement de certains versets de chorals comme par exemple le sixième de Es ist das Heÿl uns kommen her (Le salut nous est venu), véritable Fantaisie en « stylus phantasticus ». Ici ce sont presque 12 minutes de prélude au chant, en une immense déclamation parfois aux limites de la folie. Il y a dans cette musique des accents du sud, pas si éloignés de ce que Correa de Arauxo composait en Andalousie à la même époque. Weckmann et ses collègues contemporains ont souvent été décrits comme des méridionaux du nord. Comparée à d’autres versions intégrales de cette œuvre, Léon Berben, par sa grande expérience de ces répertoires offre une grande variété dans ses choix à la fois de registration, de tempi, et de discours qui font que ces pièces paraissent nouvelles à l’écoute, passionnantes à tous points de vue. Aux côtés de Hans Davidson (1 et 2), Wolfgang Zezer et Bernard Foccroulle, Léon Berben offre l’une des plus belles versions de la discographie.