Diapason
Diapason-1431
Ce programme d'apparat dans une interprétation idéale répare une grande injustice : l'oeuvre d'André Fleury mérite mieux que le purgatoire auquel il était condamné.
Maurice Clerc, son successeur à là cathédrale de Dijon, y avait gravé un disque proposant un programme plus morcelé (Euromuses), heureusement complété par celui-ci. On distingue chez Fleury de nombreuses pages de modeste envergure, non évoquées ici, auxquelles répondent quelques très grandes oeuvres triées sur le volet, comme chez Duruflé : c'est la substance même de ce disque magnifique. Disciple de Litaize et son successeur à Saint-François-Xavier (64/III+Péd.), Denis Comtet fait revivre avec infiniment de musicalité et une maîtrise instrumentale d'une formidable aisance l'esprit vif et raffiné de Fleury, véritable humaniste à l'élégance irréprochable et au charme désarmant. Son langage harmonique, bien français, ne peut se comparer à aucun autre. Un art subtil de l'évocation y trouve une source à la fois spirituelle, légère et discrète, faisant merveille dans les pièces « à climat» : superbe Prélude du Triptyque (1935), dont l'atmosphère dense et sensible traduit une remarquable maîtrise de l'écoulement du temps, de même le mouvement d'introduction (Modéré) de la Symphonie (1949) ou son troisième volet (Avec une grande liberté) y répond en deuxième position une « fileuse » (Vif), pure séduction, que devait connaître un Cochereau, grand spécialiste de cette forme de scherzo éminemment française. Les chevaux de bataille (Toccata, Final) ne sont pas moins impressionnants. A noter que l'instrument reconstruit par Bernard Dargassies sonne admirablement très beau spécimen de facture néoclassique parfaitement en situation. L'In memoriam (1990), pour le cinquantenaire de la mort de Jehan Alaîn, oeuvre d'un Fleury de quatre-vingt-sept ans, est une merveille d'intensité et d'émotion, a mille lieues de la brillante Fantaisie (1968), hommage au répertoire baroque d'une saisissante diversité de structure, très expressive. A découvrir, vraiment, pour l'oeuvre et pour qui la joue.
Technique: 8. Image avec du recul, mais la transparence et la définition sont excellentes.