Le Monde de la Musique
Michel Roubinet
Le Monde de la Musique-2372
On sait combien la virtuosité de Michelle Leclerc, jamais démonstrative, lui permet, quel que soit le répertoire, de se consacrer à la seule musique, avec infiniment de maturité et de naturel.

Si les cycles de Tournemire postérieurs à la Grande Guerre ont été bien servis par le disque, ses premières pages demeuraient négligées. Eloignées de l'univers modal de l'œuvre à venir, elles s'inscrivent dans la lignée de Franck et Widor, rehaussées de climats déjà très personnels. Elles ne sont nullement scolaires mais sensibles, toutes de goût et de concision (la Sortie est de 1894, les sept pièces des Opus 19 et 24 de 1900-1902, l'Opus 16 de 1899), même si le langage du futur Orgue mystique n'y est guère discernable. Après de passionnants disques Mozart et Déodat de Séverac (Aeolus), Michelle Leclerc ressuscite un jeune mais exigeant Tournemire alliant puissance et liberté. On sait combien sa virtuosité, jamais démonstrative, lui permet, quel que soit le répertoire, de se consacrer à la seule musique, avec infiniment de maturité et de naturel. Eclipsé par celui de Santa Maria del Coro, situé juste à côté (heureuse ville de San Sébastian), le somptueux Cavaillé-Coll de San Vicente est idéal pour ces œuvres fortes et poétiques que complètent deux des improvisations de 1930-1931, servies avec autant de lyrisme que de rigueur.

Michel Roubinet